Après le traité de Paris de 1763, le roi Louis XV souhaite que la France participe aux grandes expéditions de découverte autour du globe afin de rattraper le retard pris sur les autres puissances européennes et découvrir dans l’hémisphère sud, cette « Terra Australis Incognita« , nouveau continent septentrional plein de promesses. C’est Yves de Kerguelen-Tremarec qui partira à la recherche de cette « France australe » rêvée, dans un contexte de rivalité toujours présente avec l’Angleterre et son explorateur James Cook. Il prend la mer à Lorient le 1er mai 1771 et se rend à l’Île de france (Île Maurice) à bord du vaisseau « Le Berrier » ou il effectue une halte et prend le commandement de deux deux navires du roi de France: la flûte « la Fortune » et une gabare « Le Gros Ventre » avec lesquels il effectue un aller-retour vers les Indes pour vérifier si une nouvelle route, plus courte, est possible vers ce continent. Après une nouvelle escale à l’Île de France, il entame alors une expédition dans les mers du Sud le 16 janvier 1772.
Le 12 février, l’équipage aperçoit une terre inconnue et Yves de Kerguelen-Tremarec pense avoir découvert cette « Terra Australis » et lui donne le nom de France australe mais la météorologie qui est exécrable l’empêche alors de débarquer. Il faudra attendre le lendemain 13 février 1772 pour qu’une chaloupe avec l’enseigne de vaisseau Charles de Boisgueheneuc à son bord se rende sur la terre ferme et prenne possession de ce nouveau territoire au nom du roi.
« Le 12 février 1772 au matin, les vents au nord-ouest, grand frais, avec de la brume, je donnai la route à l’est quart-nord-est ; j’avais fait gouverner toute la nuit au sud, mais voyant au point du jour beaucoup d’oiseaux qui venaient de la partie de l’est, je me décidai à changer la direction de la route, au moins pour vingt-quatre heures, et je fis gouverner à l’est quart-nord-est. J’étais à midi par 50 degrés 5 minutes de latitude sud et par 60 degrés 5 minutes de longitude orientale estimée. Le même jour, à six heures du soir, faisant toujours même route, nous eûmes connaissance d’une petite île devant nous, à quatre lieues ; je sondai sans trouver fond, j’approchai cette île à deux lieues, et la nuit étant venue, je tins bord sur bord jusqu’au jour, à petites voiles. Je donnai publiquement vingt écus (ainsi que je l’avais promis) au matelot qui découvrirait la première terre ; et je promis le double à celui qui verrait le premier la grande terre, assurant que le lendemain, on la verrait avant midi, parce que je remarquai le soir que les oiseaux étaient en plus grand nombre et qu’ils allaient vers l’est. » 12 février 1772 Yves-Joseph de Kerguelen, extraits publiés en 1782.
En 1776, le capitaine James Cook, fait halte aux îles Kerguelen. Après l’avoir appelée « île de la Désolation » dans son journal, il donne à cet archipel découvert peu auparavant le nom du chevalier breton. Si Yves de Kerguelen-Tremarec n’a certes pas repéré un continent, il a participé aux grandes expéditions du XVIIIe siècle et découvert de nouvelles terres qui aujourd’hui portent son nom.
Après avoir subit une tempête qui sépara les 2 navires de l’expédition, Kerguelen, à bord de La Fortune, rentre en France le 16 juillet 1772 et il fait au roi une description très optimiste de la terre qu’il a découverte. Reçu comme un héros “ un nouveau Christophe Colomb” car beaucoup à la cour pensaient qu’il avait découvert le nouveau continent tant convoité, une nouvelle expédition est alors montée. Kerguelen repart pour les mers australes le 26 mars 1773 mais cette expédition se déroulera dans des conditions effroyables. Une partie de l’équipage fut décimée par des aliments avariés et les tempêtes empêchent à nouveau Kerguelen de débarquer sur l’île. A son retour les membres de la seconde expédition ne décrivent cette fois qu’une terre de désolation et il lui est reproché un faute majeur, celle d’avoir abandonné une embarcation. Kerguelen est alors traduit en conseil de guerre. Condamné à une peine d’emprisonnement, le navigateur purgera sa peine au château de Saumur en 1775 et n’est libéré qu’à la faveur de la guerre d’Indépendance Américaine, qu’il mène sur un navire corsaire. Réintégré dans son grade sous la Révolution, Kerguelen est finalement écarté de la marine en raison de ses origines aristocratiques.
Le navigateur se consacre alors à la rédaction de ses souvenirs de corsaire, publiées en 1796 et intitulés Relation des combats et évènements de la guerre maritime de 1778 entre la France et l’Angleterre. Kerguelen meurt l’année suivante, à Paris, à l’âge de 63 ans.
Les îles Kerguelen; archipel français de la partie méridionale de l’océan Indien situé à a peu près à égale distance entre le Cap de Bonne-Espérance et l’Australie. L’archipel est constitué par une île principale de près de 6.000 kilomètres carrés de superficie entourée d’environ 300 îles ou îlots. l’île Kerguelen proprement dite, appelé également île de la désolation, est une éminence basaltique, partie supérieur d’un plateau sous-marin dont le sommet atteint l’altitude de 1960 mètres. L’océan a découpé dans les roches de la partie orientale des baies profondes, mais la végétation et médiocre, cette île étant très souvent plongée dans les brumes. D’innombrables colonies d’oiseaux de mer ont trouvé sur cet archipel qui servit jadis de base aux baleiniers et qui est utilisé depuis 1951 pour des missions scientifiques et météorologique.